Clin
d’Ailes, nom du musée de l’aviation
militaire de Payerne, sis en bordure de la base aérienne du même nom, est le
fruit des efforts et de la patience d’anciens pilotes de l’escadrille
d’aviation 5, à l’origine de la fondation d’une association en 1994. Celle-ci
ne tarda pas à s’investir dans la préservation du patrimoine aéronautique en
constituant au fil des années une collection
d’aéronefs retirés du service et originellement destinés à être détruits.
Les premiers appareils sauvés furent exposés à Arnex-sur-Orbes, jusqu’à ce que
l’association, devenue Espace Passion, puisse les déplacer à Payerne, dans un
hangar construit à cet effet. Le nouveau musée ouvrit ses portes en 2003, alors
que l’association continuait à accroître sa collection, notamment en recevant
des Mirage III.
Le
musée permet au visiteur de se familiariser avec nombre d’aéronefs ayant servis
dans les troupes d’aviation suisses. Même si le nombre d’appareils visibles est
limité, l’exposition inclut également de nombreux objets, tels que réacteurs,
bombes, sièges éjectables, obus de canons, combinaisons de vol ou encore caméras,
tous mis en valeur par des panneaux explicatifs claires et didactiques. Le
visiteur aura, entre autre, l’occasion
de découvrir les trois premières
générations de jets de combat ayant équipé les troupes d’aviation suisses. Voici
donc une série de photographies des Vampire, Venom, Hunter et Mirage IIIS et RS
visibles sur place, accompagnées de brèves informations sur leur carrière dans
les cieux helvétiques.
Adrien
Fontanellaz
Vampire (photo de l'auteur) |
Le premier vol d’un
Vampire eut lieu en pleine deuxième guerre mondiale, le 20 septembre 1943. Il
s’agissait avec le Gloster Meteor ou le Me-262, d’un des premiers avions de combat
à réaction. Le premier escadron de la RAF à être équipé de ce chasseur à
fuselage bipoutre et encore partiellement construit en bois ne devint opérationnel
qu’au début de l’année 1946, trop tard pour participer à la deuxième guerre
mondiale. Armée de 4 canons de 20 mm et pesant au maximum 5'850 kg au
décollage, ce petit chasseur était capable d’une vitesse de 820 km/h au niveau
de la mer, et battit le record mondial d’altitude, atteignant 18'119 mètres, en
mars 1948.
A la fin de la guerre, et
malgré l’achat de 130 Mustang P-51D en 1948, la Suisse, soucieuse de moderniser
rapidement son aviation vieillissante, s’intéressa très tôt au chasseur de
Havilland. Une première délégation suisse s’intéressa au Vampire dès le mois d’octobre
1945 et une série d’essais fut ensuite menée à l’aide d’une poignée
d’exemplaires livrés en 1946. Le Conseil fédéral accepta rapidement l’achat de
75 machines, pour 64.5 millions de francs, et les premiers exemplaires de cette
commande furent livrés en 1949. La première unité à être équipée de Vampires
fut la 2e escadrille de l’escadre de surveillance, composée de
pilotes professionnels, faisant de la Suisse le troisième pays à s’équiper de
l’avion, après la Grande-Bretagne et la Suède. Une seconde série de 100 avions
fut bientôt commandée, mais à la différence de la première, les avions furent produits
par la petite industrie aéronautique nationale, les derniers exemplaires étant
assemblés en 1952. Enfin, 39 exemplaires biplaces de l’avion furent acquis afin
de permettre l’écolage et la conversion opérationnelle des pilotes. Au cours de
leur longue carrière en Suisse, les derniers exemplaire n’étant retirés du
service qu’en 1990, les Vampire biplaces effectuèrent un total de 68'000 heures
de vol en 139'000 sorties, pour la perte de deux avions et de trois pilotes
tués.
Venom (photo de l'auteur) |
En 1951, les Chambres
fédérales approuvèrent l’achat de 150 Venom, une évolution du Vampire mieux
adaptée aux missions d’appuis au sol et pourvue d’une nouvelle motorisation,
pour un montant de 175 millions de francs. Certains des exemplaires produits
sous licence furent des appareils de reconnaissance dont le nez avait été
modifié afin de permettre l’emport de caméras. La première commande de 150
Venom fut bientôt suivie par une seconde portant sur 100 exemplaires. Ainsi en
1956, grâce à la rapide entrée en service des Vampire et des Venom, l’ensemble
du parc d’avions de combat des troupes d’aviation était composé d’appareils à
réaction de première génération.
Venom au premier plan, Vampire à l'arrière-plan (photo de l'auteur) |
Les avancées
technologiques dans l’aéronautique durant les années 50 et 60 furent telles que
dès 1958, il fut décidé d’acquérir, toujours en Grande-Bretagne, 100 Hawker
Hunter Mk.6 pour un montant de CHF 313 millions. Cet avion, armée de quatre
canons de 30 mm, fut choisi au détriment du F-86 Sabre américain et surtout
après que le projet de chasseur endogène FFA-16 se soit avéré trop ambitieux
pour les capacités encore limitées de l’industrie nationale. Entre 1971 et
1974, une nouvelle tranche de 60 Hunter, acquis de seconde main, furent encore
livrés. Au cours de leur carrière suisse, ces chasseurs-bombardiers
effectuèrent 310'000 heures de vol, mais au prix de 30 appareils détruits dans
des accidents qui causèrent la mort de 15 pilotes.
Hunter (photo de l'auteur) |
Désireux de compléter son
parc de Hunter nouvellement acquis avec un appareil de toute dernière
génération, le Département militaire fit évaluer dès 1958 cinq modèles d’avions
différents, parmi lesquels le Lockheed Starfighter, le Saab Draken et le Mirage
III. Après une année de tests, ce fut le dernier-né de Dassault qui obtint la
faveur des aviateurs. En juin 1961, les Chambres fédérales accordaient un
crédit de 871 millions de francs devant permettre l’acquisition de 100 Mirage
III. Cependant, la volonté de produire l’appareil sous licence en Suisse et les
adaptations spécifiques demandées par les militaires eurent pour effet
d’engendrer des dépassements de coût massifs. Ainsi, en 1964, quand le Conseil
fédéral demanda une rallonge de 576 millions de CHF, le scandale fut énorme, et
causa la création de la première commission d’enquête parlementaire de
l’histoire du pays, engendrant à son tour la chute de deux hauts responsables
militaires. En septembre 1964, le nombre d’avions achetés fut réduit à 57, soit
36 Mirage IIIS de chasse, 18 Mirage IIIRS et trois biplaces de conversion
opérationnelle. Même ainsi, le parlement dût concéder une rallonge budgétaire
de 150 millions de CHF afin de couvrir l’achat des appareils.
Mirage IIIS (photo de l'auteur) |
La première unité à
recevoir les Mirage IIIS, initialement armés de missiles air-air Falcon ou
Sidewinder en plus de leurs deux redoutables canons DEFA de 30 mm, fut, en
1968, l’escadrille d’aviation 17, appartenant à l’escadre de surveillance.
Après une longue carrière, durant laquelle sept d’entre eux furent perdus, les
Mirage IIIS furent retirés du service en 1999, malgré un chantier de
modernisation qui toucha l’ensemble de la flotte entre 1988 et 1992, comprenant
l’ajout de plans canards et de nouveaux sièges éjectables.
Mirage IIIRS au premier plan, puis Hunter au second plan (photo de l'auteur) |
Les Mirage IIIRS de
reconnaissance, mis en œuvre par l'escadrille d'aviation 10,
emportaient quatre caméras dans le nez. A partir de 1981, ils purent aussi
emporter une nacelle de reconnaissance pourvue de caméras infrarouges. Les
Mirage IIIRS furent retirés du service en 2003, laissant l’armée suisse sans
capacité de reconnaissance aérienne.
Sources
Divers entrées dans le Dictionnaire historique de la Suisse
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