Pages

jeudi 10 juillet 2014

Un peu de lecture VII : De Nimègue à Java : les soldats suisses au service de la Hollande XVIIe-XXe siècles


Cet ouvrage collectif de 285 pages est le fruit d’une collaboration de plusieurs années entre le Château de Morges et ses quatre musées avec le Centre d’Histoire et de Prospective Militaires de Pully et résulte d’une journée d’étude consacrée au service de Hollande qui s’est tenue en 2010 au Château de Morges. Le livre réunit les contributions de douze auteurs - soit une partie significative des historiens militaires actifs en Suisse Romande, sous la direction de Sébastien Rial.  Contrairement à ce que pourrait laisser penser son titre, le livre présente certes le service des soldats suisses mais l’insère dans le contexte plus global des relations  politiques, économiques et militaires entre les Cantons protestants suisses avec les Provinces-Unies et ce à l’aune de la politique européenne, et tout particulièrement en regard à l’amitié parfois houleuse unissant les Confédérés au Royaume de France. Une introduction de douze pages de Sébastien Rial ; De Nimègue à Java, une histoire pluriséculaire, suivie par une chronologie de huit pages, offre ainsi au lecteur la possibilité de se familiariser avec ce contexte particulier.


 
 
La première intervention, de 14 pages, est signée par Arthur Barbéra. L’affaire des Suisses à Malplaquet, les assauts du Prince d’Orange le 11 septembre 1709, s’étend de manière très détaillée sur la partie Hollandaise de la bataille, dont l’importance est mise en lumière par le fait que ces derniers subirent environ la moitié des pertes encourues par les Alliés durant l’affrontement, les régiments suisses au service de la Hollande étant également durement touchés. Cette première partie est suivie par un texte de 13 pages, de Hubert Foerster, intitulé Johann Friedrich von Diesbach – 1677-1751 Im holländischen Dienst, ein Opfer der französischen Politik und der Freiburger Verhältnisse – 1711-1715. Pierre Streit revient ensuite sur un chapitre largement oublié de l’histoire suisse, rappelant que la Confédération actuelle est bien le fruit d’une construction parfois douloureuse dans un chapitre de sept pages ; Berne et les Provinces-Unies à l’époque de la seconde guerre de Villmergen – 1712 où il présente notamment la courte guerre ayant opposé cantons protestants et catholiques et consacra la position dominante occupée par Berne et Zürich au sein de la Confédération.
 
Quinze pages, intitulées Die Blaue Farb ist für die dauerhafteste – Uniform der Schweizer in höllandischen Diesten, sont ensuite consacrées par Jürg A. Meier aux uniformes et à l’équipement des soldats suisses avant que Guy Lecomte ne présente au lecteur la brève carrière d’un très jeune officier au service de la Hollande durant les guerres de la Révolution reconstituée grâce à des archives familiales dans La guerre dans les Flandres vue par Guillaume de Willermin, officier aux Gardes suisses – 1793-1795 (14 pages).  L’intervention suivante, longue de 11 pages est signée par Sébastien Rial et porte sur Le siège de Grave en 1794 et la vie de David Albrecht Gabriel von Gross – 1756-1809 présentant la vie d’un officier qui, outre la valeur dont il fit preuve durant la siège de Grave en 1794, au cours duquel il assuma le commandement effectif de la garnison, se révéla être un écrivain militaire de talent auteur de plusieurs ouvrages remarqués en leur temps. Alain-Jacques Tornare s’intéresse ensuite aux Vaudois, alors soumis à la domination bernoise, ayant mené une carrière militaire aux Pays-Bas dans Le service de Hollande un passage obligé pour les sujets vaudois en quête de reconnaissance ? (12 pages) et signe également Une dynastie au service de la Hollande ; la famille de Constant-Rebecque (12 pages). Jean-Jacques Langendorf, dont l’un des derniers ouvrages est recensé ici, s’intéresse à un destin somme toute surprenant, soit celui d’un natif issu d’un pays dépourvu d’accès à la mer et qui devint néanmoins stratège navale après une carrière débutée en tant qu’aspirant dans la marine hollandaise dans Victor Emmanuel Thellung de Courtelary ; Un théoricien maritime suisse du début du XIXe siècle (10 pages).
 
Quatorze pages sont consacrées par Herman Amersfoort aux années qui suivirent les guerres napoléoniennes dans The End of an Enterprise Swiss Regiments in the Royal Dutch Army – 1814-1829. Les régiments suisses réapparurent alors pour quelques années afin d’être licenciés une seconde fois le 31 décembre 1829.  Une autre destinée singulière est brièvement abordée, sur deux pages, par Martin Bundi dans Christian Jodocus Steinhauser – 1786-1863 in holländischem Dienst un sein Arithmetikbuch in Rätoromanischer Sprache avant que David Auberson ne présente l’aventure, meurtrière, des mercenaires suisses ayant servi dans l’armée coloniale hollandaise, la Koninklijk Nederlands Indisch Leger qui, contrairement à l’armée régulière, ne pouvait pas faire appel aux conscrits hollandais dont le déploiement dans les colonies était proscrit par la constitution, dans un texte de 15 pages ; Engagés pour six ans en enfer : les mercenaires suisses à la conquête de Java et Bornéo – 1855-1865. L’ouvrage se conclut enfin par un article de 7 pages de Harms Stevens; « Who in the Netherlands has not heard of Captain Christoffel?” the Peerless career of a Swiss in Dutch Colonial Service – 1886~1910.  Le lecteur découvrira ensuite de nombreuses annexes comprenant la liste des régiments suisses au service de la Hollande de 1693 à 1793 avec le nom de leurs différents propriétaires ou encore un article de deux pages sur les Cent-Suisses, la compagnie chargée de protéger le stadhouder.
 
Par ailleurs, il convient de souligner qu’outre l’intérêt de ses textes, cet ouvrage est aussi un beau livre, très densément illustré par une iconographie largement inédite. Un cahier de 23 aquarelles présentant des soldats au services de la Hollande est par exemple reproduit en milieu d’ouvrage, accompagné de légendes détaillées. In fine, la lecture de De Nimègue à Java: les soldats suisses au service de la Hollande XVIIe-XXe siècles est plus que recommandée à plusieurs titres. Parce que ce livre restera très probablement la référence sur le sujet durant des décennies d’une part mais aussi parce que la variété des articles offre des perspectives et des styles complémentaires, allant d’une narration précise et événementielle à des interventions plus beaucoup plus contextualisées. Tiré à relativement peu d’exemplaires, le livre peut être commandé directement sur le site du Château de Morges.
 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire